La Cour de cassation dans deux arrêts du 22 octobre 2015 affine la définition de la faute lourde.
Quelles en sont les conséquences pour l'employeur et le salarié ?
Dans le cadre de son pouvoir disciplinaire l’employeur dispose de 3 types de fautes qui peuvent donner lieu à des sanctions :
La cour de cassation dans deux arrêts du 22 octobre 2015 affine la définition de la faute lourde en précisant que l’intention de nuire suppose « la volonté du salarié de porter préjudice à l’employeur et ne peut se déduire l’acte lui-même ».
Dans la première affaire un salarié avait été licencié pour faute lourde pour avoir détourné sur son compte personnel une somme de 60 000 euros qui provenait du paiement d’une facture par un client de son entreprise.
La cour d’appel justifie le licenciement pour faute lourde en considérant qu’un tel détournement constituait « un abus de confiance et une tentative d’enrichissement personnel ». L’intention de nuire du salarié est caractérisée.
Dans le second dossier un directeur d’établissement d’accueil pour personnes âgées s’était octroyé une prime exceptionnelle de 3000 ainsi que des acomptes sur salaires de 15 000 euros sans en prévoir les modalités de remboursement.
Les juges du fond confirme la validité du licenciement pour faute lourde au motif que « de telles dérives financières ont porté gravement préjudice à l’entreprise et traduisent ainsi l’intention du salarié de nuire à l’employeur ».
Les deux décisions d’appel sont censurées par la Cour de Cassation au motif que les juges du fond n’ont pas caractérisé la volonté de nuire du salarié. Pour la cour de cassation « la faute lourde est caractérisée par l’intention de nuire à son employeur ce qui implique la volonté du salarié de lui porter préjudice dans l’exécution du fait fautif et ne résulte pas de la seule exécution du fait fautif. »
L’employeur doit apporter la preuve que le salarié a agi en recherchant à porter atteinte aux intérêts de l’entreprise. La preuve est très difficile à rapporter puisqu’elle revient établir le mobile du salarié.
La position de la cour de Cassation revient à cantonner la faute lourde à des situations exceptionnelles. Seuls les actes d’une particulière gravité tournés contre les intérêts de l’employeur ou de l’entreprise sont susceptibles de relever de cette qualification
En pratique, la faute lourde sera reconnue notamment en cas de concurrence déloyale de dégradation, violence ou séquestration.
La faute lourde lorsqu’elle est retenue est le seul cas de figure ou l’employeur est autorisé à engager la responsabilité pécuniaire de son salarié et obtenir la réparation de son préjudice financier.
Le principe est celui de la réparation intégrale à charge pour l’employeur de démontrer l’étendue du préjudice subi. Les montants peuvent être considérables et la seule limite se situe en termes de capacité de remboursement et de solvabilité du salarié.
Il s’agit du seul cas de demande de réparation du préjudice financier puisque qu’en droit du travail les sanctions pécuniaires sont interdites.
Le cas particulier des sanctions pécuniaires :
Les sanctions pécuniaires sont interdites, toute sanction ou disposition contraire est nulle. (Article L 122-42 du code du travail). De plus les infractions à cette interdiction sont punies par des amendes de 3750 euros / 7500 en cas de récidive (article L 152-1-5 du code du travail).
La définition donnée par le code du travail s’entend comme toute mesure prise par l’employeur en raison d’une faute du salarié alors que celui-ci a « normalement fourni sa prestation de travail » cette mesure affectant directement ou indirectement la rémunération. Article L 122-40 du code du travail
Seront considérées comme des sanctions pécuniaires les retenues sur salaire pour retard, absence ou même des retenues sur salaire relative à un dépassement du forfait de téléphone…
La seule option de l’employeur est d’engager une procédure disciplinaire à l’encontre du salarié qui peut aller de l’avertissement au licenciement si les faits le justifient.
Le 2 mars 2016 le conseil constitutionnel a été saisi d’une question prioritaire de constitutionnalité relative à la disposition du code du travail qui dispense l’employeur de verser l’indemnité de congés payés en cas de licenciement pour faute lourde. Article L3141-26 al 2 du code du travail.
Le conseil constitutionnel a déclaré cette disposition contraire au principe d’égalité devant la loi dans la mesure ou une autre disposition du code prévoit qu’il n’y a pas de perte de l’indemnité compensatrice de congés payés pour les salariés auteurs d’une faute lourde dont l’employeur est affilié une caisse de congés payés.
La déclaration d’inconstitutionnalité s’applique à partir de la date de publication c’est-à-dire à partir du 4 mars 2016.
Seules sont exclues du bénéfice du versement de l’indemnité les personnes licenciées pour faute lourde qui ont engagé une procédure contentieuse close définitivement avant le 4 mars 2016.
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