Le harcèlement moral au travail : illustrations

La chambre sociale de la Cour de Cassation sanctionne la dénonciation de mauvaise foi d'acte de harcèlement et justifie le licenciement pour faute grave d'une salariée.

Dans les faits ayant donné lieu à cette affaire, une salariée avait déposé une main courante au commissariat et adressé une lettre pour dénoncer le comportement dictatorial et humiliant du nouveau directeur comptable. Les juges ont estimé que la salariée avait dénoncé « des faits inexistants dans le but de déstabiliser l'entreprise et de se débarrasser du chef comptable et que cette dénonciation avait été effectuée de mauvaise foi ». En conséquence, la protection prévue par le Code du Travail dont bénéficie tout salarié en cas de dénonciation d'acte de harcèlement ne joue plus, le salarié peut donc être sanctionné de manière disciplinaire. En l'espèce la Cour de Cassation confirme la décision de la Cour d'Appel en indiquant que la dénonciation de mauvaise foi suffit à caractériser la faute grave.

Dans une décision rendue le même jour, la Cour de Cassation a confirmé la validité du licenciement notifié à l'encontre d'une éducatrice spécialisée pour la dénonciation d'actes de malveillance inexistants, au sein du centre medico-social où elle exerçait.

Pour la première fois, la chambre sociale de la Cour de Cassation admet que le salarié victime d'un harcèlement moral puisse bénéficier d'unedouble indemnisation liée au non respect des articles L 1152-4 et L 1152-1 du Code du Travail.

Ces articles visent respectivement :

• l'obligation pour l'employeur de prendre toutes les dispositions nécessaires en vue de prévenir les agissements de harcèlement
• et l'obligation qu'aucun salarié ne subisse des agissements répétés de harcèlement moral.

Dans les faits ayant donné lieu à cette affaire, le salarié avait pu bénéficier de dommages et intérêts pour avoir subi des agissements de harcèlement moral mais aussi une indemnité correspondant au manquement de l'employeur à son obligation de prévention des risques. En l'espèce la Cour d'Appel avait fondé son argumentation sur le fait que les obligations non respectées résultant des articles susvisés étaient distinctes et donnaient lieu à une double indemnisation. Cette argumentation a été confirmée par la Cour de Cassation. Au-delà du principe reste la difficulté de la preuve de ces deux préjudices qui avait été apportée en l'espèce. L'employeur avait été alerté en vain à plusieurs reprises de cas de souffrance au travail notamment par le médecin du travail et par un rapport d'audit interne.

La Cour de Cassation dans cet arrêt censure la décision de la Cour d'Appel qui, pour refuser l'existence d'un harcèlement moral avait procédé à une analyse séparée des faits invoqués. La Cour de Cassation rappelle que lorsque des faits précis et concordant sont établis par le salarié, il appartient au juge d'apprécier ces éléments dans leur ensemble afin que l'employeur puisse, le cas échéant, prouver que ses agissements sont justifiés par des éléments objectifs indépendants du salarié.

Par cette décision, la Cour de Cassation donne des indications quant à la nature du contrôle et la recherche des éléments de preuve dans des situations où un harcèlement est suspecté. Il convient pour les juges d'avoir une appréciation d'ensemble des faits établis pour confirmer ou non l'existence d'un harcèlement au risque de voir leur décision censurée.