Participer à la permanence des soins est une obligation déontologique pour le chirurgien-dentiste. S’il n’assure pas une garde alors qu’il s’était inscrit, il encourt en principe une sanction ordinale… sauf dans certains cas, comme l’illustre un arrêt du Conseil d’Etat du 29 mai 2020.
Une garde non assurée par un chirurgien-dentiste >
Un avertissement pour manquement à l’obligation de participer à la permanence des soins >
Un refus légitime >
Permanence des soins : des conditions à respecter >
Un chirurgien-dentiste, salarié d’un centre de santé, n’assure pas une garde de soins dentaires un jour férié, alors qu’il était inscrit au tableau de permanence.
Le praticien considère en effet que son employeur n’a pas mis à sa disposition les moyens propres à lui permettre d’assurer cette garde dans de bonnes conditions. Il a d’ailleurs informé le conseil départemental de l’Ordre de cette difficulté, à plusieurs reprises, afin de trouver une solution. Sans succès.
Une plainte est déposée à son encontre par le conseil départemental de l’Ordre des chirurgiens-dentistes.
La chambre disciplinaire de première instance inflige un avertissement au praticien. Elle considère que celui-ci a manqué à l’article R. 4127-245 du code de la santé publique qui fait obligation au chirurgien-dentiste (sauf exemption tenant à l’âge, l’état de santé et éventuellement la spécialisation) de participer au service de garde.
Il résulte de ces dispositions qu’un chirurgien-dentiste ne peut pas s’abstenir délibérément de prêter son concours à la permanence des soins, lorsqu’il ne justifie d’aucune des exemptions prévues dans les textes.
La chambre disciplinaire nationale ayant rejeté l’appel du chirurgien-dentiste, celui-ci se pourvoit en cassation devant le Conseil d’Etat.
Celui-ci annule la sanction prononcée, par un arrêt du 29 mai 2020.
Après avoir rappelé que tout chirurgien-dentiste doit prêter son concours à la permanence des soins, les juges constatent qu’il est établi qu’en l’espèce, le praticien avait fait état de difficultés pour assurer cette garde en raison d’un manque de moyens dans le centre de santé employeur. A plusieurs reprises, il avait alerté le conseil départemental avant la date de la garde, sans qu’aucune solution ne soit trouvée.
Dans ces conditions, le Conseil d’Etat considère que le chirurgien-dentiste ne peut être regardé comme s’étant délibérément abstenu de satisfaire à son obligation déontologique de participation à la permanence des soins. L’avertissement est annulé.
Les professionnels de santé salariés doivent composer avec les conditions de travail et l’organisation mise en place par leur employeur. Dans certains cas, une absence de moyens, d’effectifs, de matériel, ou des conditions de travail dégradées peuvent conduire le professionnel à refuser de réaliser certains actes ou, comme en l’espèce, d’assurer une garde.
Cette décision peut être considérée comme légitime par un juge, comme l’illustre très bien cette affaire. Mais pour l’être, il faut que le professionnel puisse apporter la preuve de la mauvaise organisation ou du manque de moyens, ainsi que de l’absence de réponse adaptée de la part de ceux qui ont la possibilité d’y remédier.
En effet, dans cette affaire, les juges se sont fondés sur le fait que le praticien avait alerté à plusieurs reprises le conseil départemental de l’Ordre, ce qui établissait qu’il existait une difficulté, qu’il n’était pas resté inactif puisqu’il avait recherché des solutions auprès de son Ordre professionnel, et enfin qu’aucune solution n’avait été proposée par l’employeur ou par le conseil départemental.
Ainsi, en cas de difficultés tenant aux conditions de travail, le salarié ne doit pas rester inactif et les signaler, si possible par écrit et collectivement, avec d’autres praticiens concernés. Selon les cas, il peut être utile d’adresser un courrier à son Ordre, comme dans cette affaire. Tous ces éléments permettront, en cas de mise en cause, d’établir sa bonne foi.
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