Une mesure supplémentaire pour compenser la pénurie de médecins
Cette mesure était attendue et "dans les tuyaux" depuis plusieurs années. Déjà, en 2019, lorsque les internes ont été autorisés à établir les certificats de décès, cette possibilité pour les infirmiers avait été examinée mais finalement rejetée.
Devant l’aggravation de la pénurie de médecins et l’augmentation des déserts médicaux, cette question ne pouvait qu’être réexaminée. Le certificat de décès est un document obligatoire pour l’organisation des obsèques du défunt. Les délais parfois très longs pour obtenir un certificat de décès, laissant les proches dans le désarroi, ont amené les députés et sénateurs à autoriser les infirmiers à signer ces documents.
La loi de financement de la Sécurité sociale pour 2023 a initié la mise en place de cette mesure dont les conditions ont été précisées par le décret du 6 décembre 2023 et le décret du 23 avril 2024.
Il ne s’agissait alors que d’une expérimentation mais la loi de financement de la Sécurité sociale du 28 février 2025 a pérennisé cette mesure en l’intégrant dans le Code général des collectivités territoriales.
L’article L2223-42 comporte désormais la disposition suivante :
"Le certificat attestant le décès peut également être établi par un infirmier diplômé d'État volontaire, dans des conditions fixées par un décret pris après avis du Conseil national de l'ordre des infirmiers".
Une possibilité offerte aux infirmiers volontaires
Les infirmiers volontaires pour signer des certificats de décès doivent se manifester auprès du conseil départemental de l’Ordre dont ils dépendent.
Les infirmiers salariés volontaires pour exercer cette nouvelle compétence doivent demander l’accord préalable de leur employeur.
Chaque conseil départemental de l'ordre des infirmiers établit et met à jour la liste des infirmiers volontaires susceptibles d'être contactés pour signer un certificat de décès.
À ce titre, lesdits conseils doivent vérifier que les infirmiers satisfont bien aux conditions fixées et mettre à disposition la liste aux structures suivantes :
- agences régionales de santé ;
- services d'aide médicale urgente ;
- communautés professionnelles territoriales de santé ;
- unions régionales des professionnels de santé des médecins libéraux ;
- services départementaux d'incendie et de secours ;
- services de police et de gendarmerie.
Une formation à suivre
Les infirmiers volontaires doivent suivre une formation de douze heures réparties en trois demi-journées et composée :
- d’un module "épidémiologie et examen clinique du processus mortel" et,
- d’un module "administratif et juridique".
La formation peut être dispensée en ligne ou en présentiel.
Au terme de ces modules, une évaluation des connaissances est réalisée permettant de s'assurer que les infirmiers sont en capacité de constater le décès et de rédiger le certificat de décès.
Une séance de supervision peut être réalisée trois mois après la formation.
Les conditions d'exercice de cette compétence
Le décret du 6 décembre 2023 définissait les conditions d’intervention de l’IDE dans l’établissement du certificat de décès pour l’expérimentation menée à ce sujet.
La loi de financement de la Sécurité sociale de 2025 prévoit qu’un nouveau décret soit validé par le Conseil de l’ordre infirmier et publié afin de définir les conditions d’intervention de l’IDE.
Même si ce décret n’a pas encore été publié, il est probable qu’il reprenne les dispositions du décret de 2023. En attendant, ce sont celles-ci que l’IDE doit respecter.
Conditions et modalités
Initialement, l’infirmier qui constatait le décès d’un patient devait vérifier l’absence de médecin disponible avant de signer lui-même le certificat de décès. Cette disposition a été supprimée par le décret d’application du 23 avril 2024.
Désormais :
- Lorsque le décès a lieu dans un EHPAD, l’infirmier sur place peut d’emblée le constater et le certifier pendant son temps de travail.
- Lorsque l’infirmier d’un service d’hospitalisation à domicile découvre le décès, il peut rédiger le certificat de décès après accord du médecin traitant ou du médecin du service dont il dépend.
L’infirmier ne peut établir le certificat de décès que lorsque :
- Le caractère violent de la mort peut être formellement exclu : lorsque le caractère violent de la mort est suspecté, l’IDE s'abstient de constater le décès et contacte le médecin traitant ou, à défaut, les services d'aide médicale urgente.
- Il est inscrit sur la liste des infirmiers volontaires : l’IDE volontaire peut rédiger le certificat sur demande des services d'aide médicale urgente, des services de police ou de gendarmerie ou du médecin traitant qui ne peut se déplacer.
Si l’infirmier ne parvient pas à établir seul les causes du décès, il doit faire appel, par tout moyen, à l'expertise d'un médecin.
L'infirmier informe chaque semaine l'Agence régionale de santé territorialement compétente du nombre de certificats de décès qu'il a établis.
Rémunération et prise en charge des frais
Les frais relatifs à l'examen du corps et à l'établissement du certificat de décès réalisés au domicile du patient seront pris en charge par le fonds d'intervention régional.
Ce fonds est piloté par l’Agence régionale de santé et financé par diverses dotations, notamment de l’Assurance maladie et de fonds de solidarité.
Un arrêté publié le 6 décembre 2023 fixe le montant de la rémunération forfaitaire à :
- 54 euros pour les décès survenant la nuit, les week-ends ou dans les zones déterminées comme fragiles en matière d’offres de soins,
- 42 euros pour les décès survenant en journée dans les autres zones du territoire.
À compétence nouvelle, responsabilité nouvelle
L’extension des compétences professionnelles implique évidemment une responsabilité supplémentaire.
L’examen du corps, la rédaction et la signature du certificat de décès obéissent à un certain formalisme que les IDE devront respecter, au risque de voir leur responsabilité civile professionnelle engagée.
Crédit photo : CALMETTES / BSIP