Une paralysie de la corde vocale après une discectomie
Une femme de 40 ans, infirmière libérale, consulte un chirurgien orthopédique pour une névralgie cervico-brachiale hyperalgique droite sur conflit disco-ostéophytique C6-C7 droit avec discopathie C5-C6. La symptomatologie est essentiellement radiculaire.
Devant l’absence de signes de gravité, le chirurgien prescrit une infiltration. Il évoque, en cas d’échec du traitement conservateur, une prise en charge chirurgicale.
L’infiltration réalisée ne donnera pas le résultat attendu.
La patiente recontacte notre sociétaire qui retient l’indication d’une discectomie avec arthrodèse C6-C7 par voie gauche.
Un consentement comportant la notion de risque neurologique est signé par la patiente.
En postopératoire, elle se voit soulagée de sa névralgie cervico-brachiale. Elle présente cependant une paralysie complète de la corde vocale gauche par atteinte du nerf récurrent.
Un avis ORL est demandé par le chirurgien. Il confirme le diagnostic.
À dix-huit mois, la problématique n’est plus rachidienne mais consiste en l’absence de récupération de la paralysie de la corde vocale gauche.
Une procédure devant la CCI est engagée par la patiente.
Pas de faute, mais un défaut d’information
L’expert désigné par la CCI conclut que :
- L’indication opératoire apparaît justifiée.
- L’intervention a été réalisée de façon conforme.
- L’atteinte du nerf récurrent gauche constitue un accident médical non fautif survenant dans 1% des cas.
Il retient une consolidation médico-légale à un an avec un déficit fonctionnel permanent de 3% devant l’absence de récupération de la paralysie de la corde vocale gauche avec une fatigabilité décrite de la voix, mais sans fausse route associée.
La patiente allègue une impossibilité de reprise professionnelle car elle a besoin de sa voix pour son métier d’infirmière. Ce que l’expert cependant ne retient pas.
Par contre, il retient un préjudice d’impréparation, devant un consentement éclairé signé mais trop générique, sans traçabilité du risque d’atteinte du nerf récurrent en peropératoire.
Deux conséquences à un défaut d’information
Le défaut d’information préopératoire peut avoir deux conséquences :
- Classiquement, lorsqu’un défaut d’information est retenu, l’expert évalue la perte de chance en rapport. Perte de chance qu’il peut même évaluer à 100% s’il estime que le patient pouvait se soustraire à l’intervention. L’assurance du chirurgien se doit alors de prendre en charge l’indemnisation de l’ensemble des postes de préjudice imputables à l’accident médical non fautif survenu, à hauteur du pourcentage de perte de chance.
- Plus rarement, il arrive que l’expert ne retienne qu’un simple préjudice d’impréparation au motif que le patient, qui n’a pas été informé des conséquences possibles d’un acte chirurgical ou d’une difficulté prévisible au cours d’une intervention, n’a pu se préparer psychologiquement à la survenue de l’événement indésirable.
Les deux conséquences (perte de chance et préjudice d’impréparation) peuvent se cumuler.
À retenir
La traçabilité écrite de l’information, qui se doit d’être exhaustive, même pour les risques exceptionnels, doit être exemplaire. Elle ne peut plus se limiter à un consentement éclairé relativement générique.
Nous disposons de livrets d’information, émanant entre autres de nos sociétés savantes, que nous nous devons impérativement de délivrer aux patients lors de la formalisation de l’acte chirurgical. Ces documents doivent être signés par le patient et cette signature doit être tracée.