Quel peut être le préjudice indemnisable par le vétérinaire tiers au contrat de vente en cas de défaut de conformité ?
Une réponse vient d’être apportée par le Tribunal de grande instance de SAINT QUENTIN dans son jugement en date du 8 janvier 2018.
Le contexte
Depuis un décret du 25 novembre 2008, le certificat vétérinaire avant cession est devenu obligatoire pour toute cession gratuite ou onéreuse de chien et ce dans le but de réduire les conflits entre acheteur et vendeurs.
Pour établir ce certificat, le vétérinaire réalise une consultation évaluant l’état de santé du chien afin de déterminer si, à ce moment précis, le chien n’est pas atteint par une anomalie génétique ou une maladie.
Ce certificat conditionne la décision de l’acheteur qui se réfèrera nécessairement à ce document.
On peut dès lors s’interroger sur les conséquences juridiques d’un contrat de vente conclu sur la base d’un certificat vétérinaire erroné.
L’acheteur, qui bien souvent souhaite conserver l’animal, aurait la possibilité d’initier une action contre le vendeur qui est tenu à garantir tant le prix de vente que l’ensemble des dommages et intérêts en cas de défaut de conformité.
(A noter qu’il n’est plus possible d’imposer à l’acquéreur d’un animal les dispositions de l’article L211-9 du code de la consommation qui prévoit le remplacement du « bien » atteint d’un défaut de conformité, en l’espèce le chiot, en raison du caractère affectif de l’achat (Cour de Cassation 1ère chambre civile 09.12.2015 n° 14-25910))
Toutefois, il est de plus en plus fréquent de voir les acheteurs intenter une action en responsabilité pour défaut de diagnostic directement à l’encontre du vétérinaire qui a procédé à l’examen préalable de l’animal.
Rappel des faits
Notre sociétaire vétérinaire a été amené à examiner un chiot, préalablement à sa vente, à la demande de l’éleveur.
Un certificat de bonne santé va être établi par notre sociétaire vétérinaire et le chiot sera vendu.
Lors du premier rappel de vaccination du chiot, il sera détecté un souffle cardiaque évocateur d’une anomalie congénitale. Une erreur de diagnostic fautive sera retenue à l’encontre de notre sociétaire et une action en responsabilité sera initiée par les acquéreurs de l’animal pour l’indemnisation de leur préjudice, ces derniers ne souhaitant pas se séparer de l’animal.
Les prétentions indemnitaires
Les acquéreurs réclamaient le remboursement de l’ensemble des frais de traitement, en cours et à venir, relatifs à l'anomalie présentée par le chiot dont la somme totale dépassait les 40 000 euros, en plus de l’octroi de dommages et intérêts.
La décision
La demande principale des acquéreurs sera rejetée par le tribunal qui rappelle à juste titre que les frais médicaux que les propriétaires de l’animal vont devoir payer, et l'impossibilité de faire avec le chien les activités qu'ils avaient envisagées, résultent directement du souffle au cœur et non de l'erreur de diagnostic commise par le vétérinaire.
Il ne sera retenu qu’une perte de chance pour les acquéreurs de ne pas acheter le chien ou de l’acheter à des conditions plus avantageuses.
Il sera octroyé la somme de 1500 euros, à titre de dommages et intérêts, prise sur la base du prix de vente du chien, bien que celui-ci n’ait pas été mentionné par les acheteurs :
" la faute [du vétérinaire] a fait perdre [aux acquéreurs] la chance de ne pas acheter le chien ou de l'acheter à des conditions plus avantageuses.
Les acquéreurs ne justifient pas du prix d'achat du chien.
Dans ces conditions, le préjudice subi sera exactement réparé par une somme de 1 500 euros de dommages-intérêts et [les acquéreurs] seront déboutés de leurs autres demandes."
Conclusion
Cette décision nous confirme le principe indemnitaire selon lequel un lien de causalité doit être démontré entre la faute retenue et le dommage allégué. Ce lien de causalité doit être, de plus, direct et certain.
Sur le même sujet :
La Cour d'Appel de Nîmes a déjà eu l’occasion de rappeler ce principe pour des faits similaires dans son arrêt en date du 29 mars 2011 (n° 08/02115).
La responsabilité d'un cabinet vétérinaire était mise en cause pour une erreur de diagnostic sur un cheval lors d'une visite d'achat.
L'acheteur sollicitait notamment à l'égard du cabinet vétérinaire le remboursement de l'ensemble des frais engagés pour l'animal en plus d'un préjudice moral.
La cour d'appel n'a pas fait droit à ces demandes et s'est prononcée de la manière suivante :
" Attendu que cette faute n’est pas la cause du dommage ; qu’elle a seulement fait perdre à Monsieur Y la chance de ne pas contracter ou de contracter à des conditions plus avantageuses ; que le préjudice qui en résulte, eu égard notamment à l’âge du cheval, sera exactement réparé par l’allocation de la somme de 2000 € à titre de dommages et intérêts."
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