Pour commencer : que savez-vous sur l’annonce du décès ?
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Une absence de réglementation qui complique la tâche des soignants
Aucun texte de loi n’encadre strictement l’annonce d’un décès aux proches. L’article R.1112-69 du code de la santé publique se borne à énoncer que "La famille ou les proches sont prévenus dès que possible et par tous moyens appropriés de l'aggravation de l'état du malade et du décès de celui-ci".
Cette absence de détails peut être vue comme un atout, puisqu’elle évite d’enfermer le soignant dans un carcan à respecter à tout prix, mais aussi comme un inconvénient : sur ce sujet très sensible, il n’est pas toujours facile de trouver les mots justes et la bonne attitude sans être guidé.
Le manque d’expérience du soignant peut être un frein supplémentaire : ainsi, une étude menée en 2018 auprès d’internes en médecine générale révèle les difficultés rencontrées par de jeunes professionnels pour effectuer correctement l’annonce, malgré les enseignements reçus pendant leurs études.
Quelques ressources existent néanmoins et il est possible de s’en inspirer, notamment :
- Les "recommandations relatives à la prise en charge de la personne décédée en établissement de santé" établies en décembre 2001 par le CLIN Paris-Nord.
- Le rapport sur "La mort à l’hôpital" de novembre 2009 de l’IGAS.
- La circulaire interministérielle du 2 décembre 2022 "relative à l'annonce du décès et au traitement respectueux du défunt et de ses proches" qui concerne le cas très particulier des décès dont la cause n'est pas manifestement naturelle et pour lesquels il existe un obstacle médico-légal.
- Le Centre national de ressources et de résilience a publié un guide intitulé "Soignant, j'annonce un décès" qui fournit des informations et conseils précieux pour les professionnels de santé.
Qui annonce le décès ?
Aucun texte ne le précise clairement.
Les "recommandations relatives à la prise en charge de la personne décédée en établissement de santé" du CLIN Paris-Nord indiquent que la notification verbale aux proches "de préférence par le personnel médical" est vivement recommandée. Selon ce rapport, "l’annonce est normalement faite par un médecin : soit le médecin en charge du patient, soit, lorsque celui-ci est absent, le médecin qui constate le décès". Le terme "normalement" est révélateur de l’absence d’assise réglementaire de l’intervention du médecin dans ce contexte.
Quant à la circulaire interministérielle du 2 décembre 2022 relative à l'annonce du décès et au traitement respectueux du défunt et de ses proches, elle précise que lorsqu’il existe un obstacle médico-légal, l’annonce doit être assurée par un médecin, de préférence celui qui a pris en charge le patient ou constaté le décès. Il est également souligné l'intérêt d'une annonce en binôme, avec un autre membre du personnel soignant, si cela est possible.
La prépondérance donnée au médecin semble provenir de l’idée qu’il est le plus apte à répondre aux questions des proches sur les causes et circonstances du décès.
Il semble donc préférable que le médecin s’en charge, même s’il ne s’agit pas d’une obligation légale, sauf indisponibilité, auquel cas l’infirmier pourrait exceptionnellement réaliser cette annonce.
Annoncer le décès par téléphone ou sur place à l’hôpital ?
Le lieu le plus adapté pour annoncer un décès n’est mentionné dans aucun texte. Il est donc possible de réaliser l’annonce en face-à-face ou à distance, notamment par téléphone.
Beaucoup de professionnels de santé s’interdisent d’annoncer le décès par téléphone et demandent systématiquement aux familles de se déplacer à l’hôpital lorsqu’elles habitent dans un rayon géographique raisonnable.
Tout dépend en réalité des circonstances :
- Si, lors de l’appel, le proche est au volant, ou dans un lieu qui ne se prête pas du tout à ce type d’annonce (transports en commun, lieu de travail, lieu bruyant, etc.), ou encore seul chez lui, avec le risque de malaise en réaction à la nouvelle : il est préférable de ne pas annoncer le décès par téléphone.
- Si, en revanche, la famille n’est pas en mesure d’organiser rapidement sa venue, ou s’il existe des contraintes importantes pour arriver vite dans le service, une annonce par téléphone est plus adaptée. Laisser entendre une issue fatale sans le dire expressément peut être bien plus anxiogène et générer les mêmes inconvénients (angoisse, malaise) qu’une annonce téléphonique, le temps que le proche se rende à l’hôpital.
IMPORTANT
L’annonce en face-à-face n’est pas un dogme à respecter à tout prix : il s’agit surtout de faire preuve de bon sens, de pragmatisme et d’humanité.
Si le soignant décide de privilégier l’annonce en face-à-face, c’est qu’il sait qu’il sera en mesure de la réaliser dans de meilleures conditions qu’au téléphone. Si ce n’est pas le cas, quelle qu’en soit la raison (par exemple un manque de temps), l’annonce par téléphone peut être préférable.
Lorsque le décès est prévisible, les modalités de l’annonce peuvent être évoquées en amont avec les familles, avec évidemment tout le tact nécessaire.
Comment accueillir les proches ?
L’annonce d’un décès est pour les proches, par définition, un moment pénible. Il est essentiel de garantir des conditions d’accueil des familles dignes, respectueuses et propices à un dialogue apaisé.
- En cas d’appel des proches pour qu’ils se déplacent pour l’annonce, précisez-leur de se présenter impérativement à l’accueil du service à leur arrivée et veillez à ce que le personnel de l’accueil soit informé : cela évite que les familles se rendent directement dans la chambre du patient et le découvrent mort, avant que l’annonce ait pu leur être faite.
- Prévoyez impérativement un lieu dédié, calme et si possible fermé : il est hors de question de faire l’annonce dans un couloir, une salle d’attente ou tout autre lieu de passage.
- Une fois les proches arrivés sur place, évitez de les faire attendre. S’il a été décidé de temporiser et de ne faire l’annonce qu’une fois la famille présente, elle ne doit pas subir une nouvelle période d’attente, forcément pénible.
- Attention à la formule d’accueil : plutôt que de dire "nous avons une mauvaise nouvelle à vous annoncer", préférez "Nous allons nous installer pour échanger tranquillement".
- Lors de l’accueil des familles, n’oubliez pas de vous présenter.
- Faites preuve de sollicitude à l’égard des proches, en veillant par exemple à ce qu’ils puissent s’asseoir ou boire un verre d’eau si nécessaire.
- Veillez à ne pas être interrompus, que ce soit par d’autres soignants ou par des appels téléphoniques.
Comment annoncer le décès ?
- C’est un impératif : une annonce se prépare en amont. Même si le temps manque, le médecin doit absolument prendre quelques minutes et consulter le dossier médical pour avoir bien en tête les éléments médicaux essentiels et les faits marquants lors de l’hospitalisation. Bien connaître le dossier aide à répondre aux questions de manière pertinente et limite les incompréhensions…voire les erreurs.
- Prenez le temps et ne vous montrez pas expéditif.
- Évitez d’employer un jargon médical que les proches ne comprendront pas. Les termes utilisés doivent être simples, compréhensibles, clairs. Évitez les formules trop convenues et pas assez explicites comme "il nous a quittés" ou "il est parti".
- Parlez lentement. Le choc de l’annonce peut amoindrir la compréhension des proches.
- N’adoptez pas une attitude défensive, même si les proches vous paraissent accusateurs.
- Soyez attentif aux signes d’un possible malaise.
- Ne négligez pas "l’après". Souvent déboussolés, les proches ont besoin d’être guidés sur la suite des événements. À ce stade, la remise d’une brochure explicative peut s’avérer utile.
- Mettez fin à l’entretien sans précipitation, en vous assurant bien que les proches n’ont plus de question et en rappelant que l’équipe est disponible dans les jours qui viennent.
- Si d’autres étapes sont prévues après l’annonce (par exemple, entretien des proches avec un autre soignant, récupération des effets personnels, etc.), assurez-vous de la bonne information de tous : s’il n’est évidemment pas possible de rester à disposition au-delà de l’annonce, vous devez avertir les personnes supposées intervenir après vous de ce qui est attendu pour éviter tout malentendu qui imposerait aux proches une nouvelle attente inutile.
A la fin de l’entretien, consignez-en les grandes lignes dans le dossier médical.
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En résumé : la check-list à respecter