Comment concilier régime alimentaire et respect des rites religieux du patient hospitalisé ?
Plusieurs textes reconnaissent au patient le droit d’exercer son culte pendant la durée de son hospitalisation. Cet exercice inclut l’alimentation et, a contrario, la possibilité de jeûner à l’occasion de certaines fêtes religieuses.
Mais ce droit n’est pas illimité, puisqu'il peut être restreint par les contraintes liées à l’organisation et au fonctionnement du service.
Bien qu’il ne s’agisse pas d’une obligation, l’établissement peut proposer des repas adaptés aux principes religieux d’un patient, si celui-ci le souhaite. La plupart des textes cités s’applique aux établissements publics de santé.
Mais le libre exercice du culte est une liberté fondamentale reconnue au patient même dans un établissement privé.
S’il ne figure pas expressément dans les textes, le jeûne fait bien partie des préceptes religieux liés à l’alimentation.
L’établissement est donc supposé faciliter l’exercice de ce jeûne, si le patient le souhaite.
Il faut cependant distinguer selon que le patient est mineur ou majeur, comme le rappelle l’Observatoire de la laïcité dans son guide précité "Laïcité et gestion du fait religieux dans les établissements publics de santé".
Les textes garantissent l’exercice de leur culte par les patients, mais on notera que lorsqu’il est spécifiquement question de l’alimentation, l’expression "dans la mesure du possible" est souvent utilisée.
L’établissement n’a donc pas, à proprement parler, d’obligation.
En toutes hypothèses, les adaptations trouvent leurs limites dans l’organisation et le fonctionnement du service.
En particulier, les choix alimentaires exprimés par les patients ne doivent pas compromettre les exigences sanitaires, ni créer de désordres, comme le rappelle le Guide de l’Observatoire de la laïcité.
Par un arrêt du 25 février 2015, le Conseil d’Etat a rappelé ces limites, certes dans un autre contexte, puisqu’il s’agissait, non d’un hôpital, mais d’un établissement pénitentiaire. Néanmoins, le raisonnement adopté pourrait également s’appliquer aux établissements hospitaliers.
Le Conseil d’Etat commence par rappeler l’article R. 57-6-18 du code de procédure pénale, relatif à l’alimentation des personnes détenues, qui prévoit que chaque personne détenue reçoit une alimentation tenant compte,"dans toute la mesure du possible, de ses convictions philosophiques ou religieuses". Il évoque également l’article 9 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales selon lequel "la liberté de manifester sa religion ou ses convictions ne peut faire l’objet d’autres restrictions que celles qui, prévues par la loi, constituent des mesures nécessaires, dans une société démocratique, à la sécurité publique, à la protection de l’ordre, de la santé ou de la morale publiques, ou à la protection des droits et libertés d’autrui".
Puis, il cite l’article 26 de la loi pénitentiaire du 24 novembre 2009 selon lequel "Les personnes détenues ont droit à la liberté d’opinion, de conscience et de religion. Elles peuvent exercer le culte de leur choix, selon les conditions adaptées à l’organisation des lieux, sans autres limites que celles imposées par la sécurité et le bon ordre de l’établissement".
Le Conseil d’Etat conclut que tous ces textes, qui visent à permettre l’exercice par les personnes détenues de leurs convictions religieuses en matière d’alimentation, n’imposent pas à l’administration de garantir, en toute circonstance, une alimentation respectant ces convictions.
Au regard de l’objectif d’intérêt général du maintien du bon ordre des établissements pénitentiaires et aux contraintes matérielles propres à la gestion de ces établissements, cela ne peut être regardé comme portant une atteinte excessive au droit des détenus de pratiquer leur religion.
Un raisonnement similaire peut raisonnablement être tenu pour un établissement de santé.
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Ce dossier spécial est consacré à la laïcité et à la gestion du fait religieux en établissement de santé ou au sein du cabinet médical.