Le changement de régime matrimonial est toujours possible pour les époux, sous réserve de respecter certaines conditions.
Et cela est vrai que vous soyez marié sous le régime de la communauté réduite aux acquêts (ce qui est le cas quand aucun choix spécifique n’a été fait par les époux lors de leur mariage), dans celui de la séparation de biens ou bien encore que vous ayez fait le choix de la communauté universelle.
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Plusieurs raisons peuvent vous y conduire. Dans tous les cas, ce changement devra être réalisé dans l’intérêt de la famille.
Lors du changement d’activité professionnelle
Pour protéger sa famille
Quand l’un des époux décide de se mettre à son compte, en tant qu’indépendant ou dirigeant de société, le changement de régime matrimonial peut permettre de protéger le patrimoine de l’autre conjoint et la résidence principale du couple.
Tel sera le cas si les époux sont mariés sous un régime de communauté (réduite aux acquêts ou universelle).
En effet, en devenant entrepreneur ou professionnel libéral, l’époux en question peut engager des fonds et sa responsabilité. Et si le patrimoine est commun, dans sa totalité ou en partie, les époux seraient solidairement responsables face aux créanciers.
La solution consiste alors à passer d’un régime de communauté à un régime de séparation de biens. Les dettes et engagements pris par l’époux entrepreneur ne pourront, en principe, atteindre le patrimoine de l’autre époux.
Pour protéger la liberté d’action du conjoint entrepreneur
Mais le passage d’un régime de communauté à un régime de séparation de biens, peut également être motivé par le fait d’assurer une totale liberté de décision au conjoint entrepreneur.
Si les époux ne sont pas dans un régime de séparation de biens, l’époux entrepreneur sera en effet dépendant de l’autre pour plusieurs décisions importantes :
- contracter des dettes,
- donner des garanties (hypothèque, cautionnement, nantissement),
- réaliser des apports en capital ou encore donner à bail.
En séparation de bien, l’époux entrepreneur est le seul à décider pour ce qui relève de son activité professionnelle.
Pour réserver les fruits d’une entreprise à son seul créateur
Enfin, le passage d’un régime de communauté vers un régime de séparation de biens peut être le moyen de réserver au seul conjoint entrepreneur le bénéfice des fruits de son travail.
Prenons le cas d’un couple dans lequel l’un des époux est, par exemple, infirmier ou médecin:
Si ce dernier a créé son activité et acquis sa patientèle après s’être marié et que rien n’a été prévu au moment du mariage, alors, en cas de divorce, la valeur de la patientèle sera intégrée à la communauté et le partage sera fait entre les deux futurs ex-conjoints.
Tel ne sera pas le cas si les époux ont adopté le régime de la séparation de bien.
Si la patientèle a été acquise ou créée avant le mariage, elle restera un bien propre de l’époux infirmier ou médecin à condition que les époux aient fait le choix de la communauté réduite aux acquêts ou de la séparation de biens.
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Lors du départ à la retraire ou de la vente d’une entreprise
A l’inverse, un chef d’entreprise, un libéral, peut vouloir faire bénéficier (notamment au décès) son conjoint des fruits de son travail. C’est le cas notamment quand l’époux entrepreneur prend sa retraite ou décide de vendre son entreprise ou son activité.
Dans la plupart des cas, les conjoints ont tout intérêt, avant le départ en retraite ou la réalisation de l’opération de cession, à passer d’un régime de séparation de biens à un régime communautaire.
De façon moins radical, il leur est également possible d’aménager leur régime matrimonial actuel. Par exemple, ils peuvent adjoindre à leur régime de séparation de biens une société d’acquêts.
Afin de protéger le conjoint survivant
Si vous avez opté jusqu’à présent pour la séparation de bien ou la communauté réduite aux acquêts, vous pourriez souhaiter, l’âge venant, aller vers plus de protection.
La communauté universelle se présente alors comme le moyen d’assurer au conjoint survivant la pleine propriété de la moitié des biens en plus de sa part sur l’autre moitié, en tant qu’héritier.
Votre couple peut en plus décider d’aller plus loin encore par l’usage de clauses, par exemple en prévoyant une clause d’attribution intégrale au conjoint survivant. Les enfants n’héritent alors qu’au décès du second époux.
Des précautions seront à prendre le cas échéant compte tenu des effets en matière de droits successoraux.
Les formalités du changement
Changer de régime matrimonial va nécessiter l’accomplissement de certaines formalités, celles-ci vont être différentes en fonction de votre régime originel, du régime souhaité, ainsi que la présence, ou non, d’enfants mineurs.
- Sans enfants :
Le changement de régime matrimonial doit faire l’objet d’un acte notarié. Cet acte contiendra en détail toutes les modifications apportées au régime, par exemple : l’étendue de la société d’acquêts, l’exclusion de communauté de certains biens, ...
Lorsque le changement de régime a pour effet de réduire, ou supprimer la part de communauté dans le régime, par exemple en passant d’une communauté universelle à une communauté réduite aux acquêts, ou à une séparation de biens, il faudra procéder à la liquidation de cet ancien régime, sous peine de nullité du changement.
Une fois la liquidation du régime effectuée, et le changement de régime prononcé, il faudra procéder au partage de la communauté, dans un acte distinct, ce qui entraînera des droits de partage. Si le partage intervient avant que le changement ne soit finalisé, il sera nul.
À l’inverse, si les époux souhaitent passer à un régime plus communautaire, il ne sera pas nécessaire de procéder à la liquidation du premier régime, ni au partage.
- En présence d’enfants majeurs
Les enfants majeurs des époux, communs aux deux époux ou non, ainsi que les personnes ayant été parties au contrat de mariage, c’est-à-dire les représentants des enfants mineurs au jour du mariage, doivent être informés personnellement de la modification du régime.
Cette information se fait soit par lettre recommandée avec accusé de réception, soit par voie de signification.
Une fois informés, ils ont trois mois pour s’opposer au changement.
En cas d’opposition, le changement devra nécessairement faire l’objet d’une homologation par le juge aux affaires familiales. Le juge viendra homologuer ou non le changement en fonction de tous les intérêts en l’espèce.
Si l’un des enfants majeurs fait l’objet d’une mesure de protection juridique, la personne pouvant s’opposer va varier selon la mesure :
- Tutelle : c’est le tuteur qui doit être informé, et qui pourra seul s’opposer au changement.
- Curatelle : l’enfant majeur et le curateur sont informés, mais c’est l’enfant majeur qui pourra seul s’opposer au changement.
- Sauvegarde de justice : c’est l’enfant majeur qui doit être informé, et qui pourra seul s’opposer au changement.
- En présence d’enfants mineurs
En présence d’enfants mineurs, le changement ne nécessitera pas de formalités supplémentaires particulières.
Cependant, si le notaire estime que le changement pourrait porter atteinte aux intérêts de l’enfant mineur, il va saisir le juge aux affaires familiales qui viendra autoriser ou non ce changement.
Si l’un des enfants mineurs est sous tutelle, son tuteur, ou tuteur subrogé s’il s’agit de ses parents, devra être informé du changement, et pourra s’opposer au changement, dans le délai de trois mois. Auquel cas le changement devra être homologué par le juge.
- Si l’un des époux est sous une mesure de protection juridique
Si l’un des époux fait l’objet d’une mesure de protection, quelle qu’elle soit, le changement de régime sera nécessairement soumis à l’autorisation préalable du juge des contentieux de la protection ou du conseil de famille, qui vérifiera que ce changement ne porte pas atteinte aux intérêts de l’époux protégé.
Formalités de publication :
Si le changement de régime a pour effet d’opérer une mutation entre les époux d’un bien immobilier, un bien propre qui devient commun ou inversement par exemple, l’acte de changement ainsi que le jugement d’homologation, s’il y en a un, doivent être publiés par le notaire dans chacun des services de publicité foncière dont dépendent les biens immobiliers.
Si le changement n’a pas donné lieu à un partage, ou à un changement d’attribution, l’acte notarié de changement n’aura pas à être publié.

