Qu'est-ce que la discrimination
La discrimination correspond à une situation dans laquelle une personne est traitée de manière moins favorable qu’une autre, dans un contexte comparable, en raison d’un critère prohibé par les textes (par exemple l’origine, l’apparence, le handicap, etc.).
Le corollaire de cette notion est, logiquement, le principe de non-discrimination, c’est-à-dire l’interdiction de comportements discriminants, en particulier dans les domaines prévus par la loi, comme l’emploi, l’accès aux biens et services et, bien sûr, la santé.
La définition du refus de soins discriminatoire est donnée par l’article R1110-8 du code de la santé publique (CSP), introduit par le décret du 2 octobre 2020.
Les motifs de discrimination visés au Code pénal
L’article 225-1 du code pénal liste les motifs de discrimination susceptibles d’être sanctionnés :
- L'origine.
- La situation de famille.
- L'apparence physique.
- La particulière vulnérabilité résultant d'une situation économique.
- Les mœurs, l'orientation sexuelle, l'identité de genre.
- L'âge.
- Les opinions politiques et l'appartenance syndicale.
- L'appartenance à une ethnie, une nation, une prétendue race ou une religion déterminée.
- Le sexe.
- La situation de grossesse.
- Le patronyme.
- Le lieu de résidence.
- L'état de santé, de perte d'autonomie, le handicap ou les caractéristiques génétiques.
- La capacité à s'exprimer dans une autre langue que le français.
La définition du refus de soins discriminatoire selon le code de la santé publique
La définition du refus de soins discriminatoire est donnée par l’article R.1110-8 du Code de la santé publique (CSP), introduit par le décret n°2020-1215 du 2 octobre 2020.
Constitue un refus de soins discriminatoire toute pratique tendant à :
- empêcher ou dissuader une personne d'accéder à des mesures de prévention ou de soins ;
- par quelque procédé que ce soit et notamment par des obstacles mis à l'accès effectif au professionnel de santé ou au bénéfice des conditions normales de prise en charge financière des actes, prestations et produits de santé ;
- pour l'un des motifs de discrimination mentionnés aux articles 225-1 et 225-1-1 du Code pénal, ou au motif que cette personne bénéficie du droit à la protection complémentaire en matière de santé.
Ces pratiques discriminatoires trouvent souvent leur source dans des stéréotypes, conscients ou inconscients, et des biais sur tel ou tel profil de patient.
L'interdiction du refus de soins discriminatoire selon le code de la santé publique
L’article L1110-3 du CSP pose le principe selon lequel aucune personne ne peut faire l'objet de discriminations dans l'accès à la prévention ou aux soins.
En vertu de ce texte, un professionnel de santé ne peut refuser de soigner une personne pour un des motifs visés à l’article 225-1 ou 225-1-1 du code pénal ou au motif qu'elle est bénéficiaire de la protection complémentaire en matière de santé.
Quelques exemples de refus de soins discriminatoires
Dans son rapport "Prévenir les discriminations dans les parcours de soins : un enjeu d’égalité" de 2025, la Défenseure des droits cite plusieurs exemples de discriminations, recueillis suite à un appel à témoignages lancé auprès du grand public (patients et soignants) entre le 8 novembre 2024 et le 6 janvier 2025.
Les 1 500 témoignages qui ont fondé le rapport révèlent des discriminations sur des motifs extrêmement variés, évidents ou plus insidieux, volontaires ou inconscients, concernant l’accès aux soins ou les prises en charge :
- Refus de soins pour des motifs économiques : refus de rendez-vous aux patients couverts par la Complémentaire Santé Solidaire, impossibilité pour ces seuls patients de reprendre rendez-vous sur une plateforme en ligne après une consultation manquée ou encore créneaux spécifiques de rendez-vous.
- Appréciation différenciée de l’état de santé selon la couleur de peau lors d’un appel aux services d’urgence.
- Propos stigmatisants.
- Refus de recevoir un patient en raison de son handicap (par exemple par l’invocation d’un cabinet "non accessible" alors qu’aucune adaptation – pourtant possible techniquement – n’a été réalisée).
- Refus de recevoir une patiente portant un voile religieux.
- Prise de rendez-vous impossible pour les personnes porteuses de certains handicaps.
Un motif récurrent de discrimination attire particulièrement l’attention en raison de son caractère paradoxal : le refus de soins lié à l’état de santé. Alors qu’il paraît inconcevable que l’existence d’une pathologie constitue un motif de refus de soins de la part d’un soignant, certains témoignages recueillis par la Défenseure des droits vont pourtant dans ce sens :
- Refus de prise en charge par le soignant en raison d’inquiétudes pour sa propre santé.
- Refus de prise en charge en raison de la durée supplémentaire de consultation induite par une pathologie chronique ou rare.
- Refus de prise en charge de patients séropositifs au VIH pour des soins dentaires, etc.
Quels sont les recours du patient en cas de refus de soins discriminatoire ?
Le principe est posé aux articles L.1110-3 et R.1110-11 du CSP : toute personne s’estimant victime d'un refus de soins illégitime peut saisir le directeur de l'organisme local d'assurance maladie ou le président du conseil territorialement compétent de l'Ordre professionnel concerné. Cette saisine vaut dépôt de plainte.
La procédure est la suivante
Cette procédure ne s’applique que s’il n’y a pas de récidive
Si le professionnel a déjà fait l’objet, dans les six années précédentes, d’une sanction pour refus de soins discriminatoire, la plainte est directement transmise à la chambre disciplinaire de 1re instance sans passer par les étapes intermédiaires.
Un bilan est prévu chaque année, pour évaluer l’étendue des refus de soins discriminatoires, et est transmis notamment au Défenseur des Droits.
Quelles sanctions pour le professionnel de santé coupable d'un refus de soin discriminatoire ?
Les sanctions sont de deux ordres.
Sanctions ordinales
Les ordres professionnels posent tous un principe général de non-discrimination selon lequel le soignant doit écouter, conseiller ou soigner avec la même conscience toutes les personnes, quels que soient leur origine, leurs mœurs et leur situation de famille, leur appartenance ou non-appartenance à une ethnie, une nation ou une religion déterminée, leur handicap et leur état de santé, leur réputation ou les sentiments qu'il peut éprouver à leur égard.
En cas de non-respect de ce principe, une sanction ordinale peut être prononcée.
Pénalités financières
Prononcées par le directeur de l’organisme social, d’un montant égal à deux fois le plafond mensuel de sécurité sociale. Ces sanctions peuvent faire l’objet d’un affichage ou d‘une publication.
En cas de récidive dans les six ans, la suspension de la participation au financement des cotisations sociales peut être prononcée pour une durée maximale de trois années.
Rappel
Un refus de soins est possible dès lors qu'il n'est pas discriminatoire
Les codes de déontologie rappellent le principe selon lequel, hormis le cas particulier de l’urgence, et celui où le professionnel de santé manquerait à ses devoirs d'humanité, il est toujours possible d’opposer au patient un refus de soins :
- pour raisons personnelles (par exemple, la perte de confiance mutuelle) ;
- pour raisons professionnelles (telle que l’impossibilité de prendre en charge de nouveaux patients).
Dans ce cas, le soignant qui se dégage de sa mission doit en avertir le patient et la continuité des soins doit être assurée.