Écouter, accueillir, protéger : l’importance du premier contact
Le premier échange entre le soignant et la victime est souvent décisif. Dans ce moment de grande vulnérabilité, l’attitude du professionnel de santé conditionne la suite de la prise en charge.
Il est essentiel de :
- créer un climat de bienveillance ;
- respecter le rythme et la parole de la victime ;
- obtenir un consentement éclairé avant tout acte médical (hors réquisition) ;
- adapter l’entretien au contexte : pour les mineurs, la présence d’un adulte référent est requise (sauf exception judiciaire).
Cet accueil permet non seulement de poser les bases d’un soin de qualité, mais aussi de détecter d’éventuels besoins psychologiques urgents.
L’examen médical : rigueur clinique et respect absolu
L’examen clinique doit être mené avec une extrême délicatesse. Il ne s’agit pas seulement de diagnostiquer ou de constater, mais aussi de respecter l’intégrité physique et émotionnelle de la victime.
Quelques principes clés
- Expliquer chaque étape de l’examen en amont.
- S’assurer que la victime a bien compris et accepté ce qui va être réalisé.
- Travailler, si possible, dans un lieu calme et sécurisé, avec un seul intervenant pour limiter les interactions stressantes.
L’objectif de l’examen est multiple
- Identifier des lésions traumatiques visibles.
- Réaliser, si nécessaire, un examen gynécologique ou anal.
- Effectuer des prélèvements biologiques (IST, ADN).
- Proposer une contraception d’urgence (jusqu’à 72h).
- Initier un traitement post-exposition VIH (dans les 48h).
- Vérifier la vaccination (tétanos, hépatite B).
- Soulager la douleur physique et orienter vers un suivi psychologique.
Chez les mineurs, cet examen relève d’équipes spécialisées.
Le certificat médical initial : une pièce maîtresse
Le certificat médical initial est souvent le seul lien entre les constatations cliniques et la justice. Il doit être précis, neutre et structuré.
- Il est rédigé par un médecin inscrit à l’Ordre.
- Il doit relater les faits observés, sans interprétation.
- Les propos de la victime sont retranscrits entre guillemets.
- Il comprend l’identité du patient, les lésions constatées, les examens effectués.
- Le certificat doit être daté, signé, mentionnant l’heure et le lieu de l’examen.
- Une copie est conservée, et l’original remis à la victime ou à son représentant légal
Ce document peut être demandé par la victime ou réalisé dans le cadre d’une réquisition judiciaire.
Dans tous les cas, il est essentiel qu’il soit factuel, rigoureux et rédigé avec prudence.
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Intervenir en cas de réquisition judiciaire
Lorsqu’un médecin est requis par les autorités judiciaires, il intervient en tant qu’expert, et non comme soignant traitant. Le cadre est spécifique :
- Le consentement de la victime n’est pas requis.
- Le médecin se limite strictement aux questions formulées dans la réquisition.
- Il informe la victime de la nature judiciaire de son intervention.
- En cas de conflit d’intérêts ou de lien avec la victime, il peut se récuser.
Même dans ce contexte, la bienveillance et le respect de la victime demeurent essentiels.
Signalement : que faire et dans quelles situations ?
Le signalement est une démarche lourde, mais parfois indispensable pour protéger une victime. Voici les grandes lignes à retenir :
- Il est obligatoire pour les mineurs et les majeurs vulnérables (personnes âgées, handicapées, enceintes…).
- Pour un adulte sans vulnérabilité particulière, il ne peut être fait qu’avec son accord, sauf danger grave et imminent.
Le signalement est adressé au Procureur de la République ou à la cellule départementale de recueil. Il suit les mêmes règles qu’un certificat médical :
- Objectivité.
- Absence d’interprétation ou de jugement.
- Propos de la victime rapportés entre guillemets.
- Ne jamais désigner l’auteur présumé des violences : il est essentiel de se rappeler que l’identification de l’agresseur relève de la justice et non du professionnel de santé. Tout signalement imprudent peut exposer à des poursuites pour diffamation ou dénonciation calomnieuse.
En cas de doute, rapprochez-vous du conseil de l’Ordre des médecins ou de la direction de l’établissement dans lequel vous exercez : des protocoles internes peuvent encadrer la prise en charge des violences sexuelles et vous aider à sécuriser vos démarches.