Décès sur table d’un patient de 81 ans lors d’une procédure TAVI
Il est découvert chez un patient de 81 ans un rétrécissement aortique calcifié dans le cadre d'une dyspnée et de malaises répétés.
La fonction ventriculaire gauche est préservée mais la valve aortique présente un gradient moyen de 49 mmHg. Il est donc proposé l'implantation d'une valve percutanée aortique (TAVI).
La veille de l'intervention, le chirurgien cardiaque évoque également la possibilité de faire le geste de façon traditionnelle par CEC, ce qui perturbe grandement le patient et sa famille.
Après la réalisation d'un scanner pré-implantatoire, une réunion multidisciplinaire valide l'indication, mais laisse à l’équipe le choix de la technique en fonction de l'anatomie du patient.
Lors de la procédure, elle est confrontée à une rupture de l'anneau aortique avec épanchement péricardique.
Malgré un drainage percutané efficace et la mise en place d'une deuxième valve permettant un colmatage de la brèche, la procédure se complique d'une obstruction coronaire entraînant le décès du patient sur table.
Un aléa thérapeutique sans faute
Dans le cadre d'une procédure CCI, l'équipe ayant adressé le patient au centre expert ainsi que l'ensemble des opérateurs de ce centre sont mis en cause.
Lors de l’expertise, la famille dit regretter de ne pas avoir été impliquée dans le processus d'information, aussi bien par l'équipe qui a décidé d'adresser le patient que par celle qui a réalisé le geste.
Pour autant, différents courriers et le dossier médical précisent que :
- le patient a bien été informé des thérapeutiques,
- un délai de réflexion suffisant (1 mois) lui a été laissé,
- le document de la SFC a été également signé.
L'expert constate les propos discordants la veille de l'intervention par le chirurgien, préconisant plutôt une chirurgie traditionnelle, alors que l'information s'était orientée depuis le début vers un TAVI, aussi bien par le cardiologue traitant que par l'équipe adressant le patient au centre expert.
Finalement, au terme de la procédure, il est retenu le principe d'un aléa thérapeutique, sans faute, rappelant que le risque de rupture d'anneau était un événement rare entre 0.4 et 2.3%1.
Les recommandations de la MACSF pour une bonne information du patient
Comme pour tout acte invasif, il importe de s'entourer de toutes les précautions concernant l'information.
Une information à toutes les étapes du diagnostic et de la prise en charge
En tout premier lieu, le cardiologue traitant peut commencer déjà à évoquer la procédure TAVI dès que le rétrécissement aortique montre une évolutivité, ou bien lorsque la sténose s'approche du seuil significatif.
Afin d'être progressif dans les informations et la préparation du patient, il n'est pas inutile, quand on est le cardiologue qui découvre la maladie, d'expliquer que la sténose aortique a des chances de devenir de plus en plus serrée, de provoquer des symptômes tels que la dyspnée, les douleurs et les malaises.
Dès lors que la sténose va devenir significative, il faudra expliquer qu'aucun traitement autre que le remplacement valvulaire ne permettra d'enrayer le processus (implantation percutanée, TAVI ou remplacement valvulaire chirurgical).
La prudence exige d’inviter le patient à en parler à son entourage car, assez souvent, il garde cette information pour lui.
Et en cas de complication, il n'est pas rare d'avoir des familles très critiques, car souvent choquées par le tournant fatal…
Une information tracée
En matière d'information, tous les moyens sont bons pour prouver que celle-ci a été délivrée.
Cette information sera essentiellement orale, mais on devra retrouver une traçabilité dans les courriers rédigés par le spécialiste, du type : "Je l'ai bien entendu informé des risques évolutifs de la maladie, mais également des bénéfices et risques du remplacement valvulaire". Dans un second temps, l'information portera sur les complications propres de chaque technique.
La remise du document spécifique de la société française de cardiologie2 est un atout indispensable, car il permet d'être plus exhaustif.
Pour autant, l'information ne doit pas reposer uniquement sur la remise et la signature de ce document.
Une attention particulière doit être apportée lorsque le patient ne sait pas lire ou ne comprend pas le français. Pour cela il faudra impliquer les membres de sa famille qui pourront lire le document et lui donner l'explication.
Un devoir d’information partagé par tous les acteurs
Avec une multitude d’intervenants, il est important que chaque membre de l'équipe médicale veille à la continuité de l'information.
Lorsque le bilan va confirmer l'indication après évaluation des lésions coronaires, de l'abord vasculaire et de la faisabilité, l'équipe de cardiologie interventionnelle ou le chirurgien cardiaque doit s'attacher à l'explication plus spécifique du geste qui sera choisi.
Dans certains cas, le geste sera réalisé dans un autre établissement qui dispense l'autorisation. Il est préférable que l'information débute en amont du transfert.
Pour autant, cela n'exonère pas le centre qui va réaliser le geste de vérifier la bonne compréhension du patient ainsi que son niveau d'information.
En conclusion
Le rétrécissement aortique calcifié est une maladie rapidement mortelle, dès lors qu'apparaissent des symptômes. La technique TAVI, de valve percutanée implantée par voie fémorale, est devenue très performante avec un risque de morbi-mortalité se réduisant de plus en plus.
Devant cette banalisation de la technique, on assiste aujourd'hui à des exigences de plus en plus marquées de la part des familles.
Il convient, afin de se prémunir du risque médicolégal, d'apporter une information le plus précocement dans la prise en charge, et devenant progressive sur le contenu, mais également par l'ensemble des acteurs de la prise en charge.

