Les mises en cause du vétérinaire autour de l’acquisition d’un chien
Dr Vre Michel BAUSSIER
Le 06.05.2019
La cession d'un chien requiert l'élaboration d'un certificat précisant son état de santé. Voici les points clés en matière de certificat et de responsabilité du vétérinaire.
La cession d'un chien requiert l'élaboration d'un certificat précisant son état de santé. Voici les points clés en matière de certificat et de responsabilité du vétérinaire.
Le problème était celui d’un certificat de bonne santé erroné : le chiot avait été certifié en bonne santé alors qu’il était porteur d’une anomalie cardiaque congénitale imposant un traitement coûteux. Le tribunal n’avait pas suivi les demandeurs dans l’indemnisation du préjudice par le praticien, le vétérinaire n’étant évidemment pas responsable de la maladie du chien, mais il l’avait condamné à indemniser une perte de chance (dommages et intérêts avoisinant un prix de vente de chiot) en raison du défaut d’information.
L’article faisait à juste titre le rapprochement avec le cas de la visite d’achat du cheval, celle-ci ayant conduit nombre de vétérinaires devant les tribunaux, l’acheteur mécontent ne se contentant généralement plus de mettre en cause le vendeur dans le cadre de la garantie due pour l’animal vendu mais attrayant également à la cause le praticien ayant réalisé la visite d’achat.
La mise en cause du vétérinaire en cas de certificat vétérinaire inexact
Il est clair qu’un processus sociétal identique est engagé depuis que le certificat vétérinaire avant cession d’un chien est devenu obligatoire(1). Dans le cas du chiot, le vétérinaire est assez souvent seul mis en cause. Quelques autres exemples que celui évoqué ci-dessus :
Le tribunal d’instance de Thionville ici aussi avait condamné un praticien à indemniser l’acheteur d’un chiot ; certes le praticien avait ausculté le chiot lors de l’établissement du certificat mais seulement du côté gauche alors que le souffle était davantage audible à droite, de ce fait il ne l’avait pas perçu ; l’indemnisation a visé ici à réparer le dommage dû à la malformation elle-même.
Dans une procédure amiable en 2019, l’assureur du praticien endosse les frais vétérinaires nécessités par le traitement chirurgical d’une fracture radiale vicieusement consolidée responsable à la fois d’une déformation du membre et d’une boiterie, visibles le jour de la rédaction du certificat, laquelle rédaction précéda de quelques heures seulement la livraison du chiot.
Le tribunal d’Instance d’Orange, dans un litige entre vendeur et acheteur non professionnels, par un jugement du 19 juin 2018, a toutefois débouté le demandeur en raison de la prescription de l’action, laquelle portait sur l’implantation des crocs de lait et non point des canines définitives (crocs convergents), le demandeur invoquant l’impossibilité de faire confirmer ultérieurement le chien dans la race (non-conformité au pédigrée).
Il est clair qu’une partie des litiges qui opposaient autrefois les acheteurs aux vendeurs vont aujourd’hui impliquer personnellement les vétérinaires rédacteurs du certificat avant cession. Une partie des affaires autour de la garantie due par le vendeur à l’acheteur vont se trouver dérivées vers la RCP du praticien.
La lecture du rapport annuel de la MACSF concernant les risques professionnels (RCP) en médecine vétérinaire canine amène à constater que plus de 20 % des sinistres ont trait à ce qui est qualifié de « formalités », dont plus de la moitié concernent précisément ces certificats vétérinaires avant cession d’un chien.
Il y a donc lieu pour les vétérinaires de considérer avec la plus grande attention ces certificats vétérinaires et surtout la consultation qui donne lieu à leur établissement. Il ne s’agit en aucun cas d’une simple formalité. L’examen doit être consciencieux, minutieux, attentif. L’intérêt du vétérinaire n’est plus forcément convergent avec celui du maître de l’animal, vendeur en puissance, assez souvent un éleveur professionnel, demandeur d’un examen rapide sinon furtif et en tout cas pas cher… Le vétérinaire doit savoir ici faire preuve d’autorité. Il y va de la préservation de ses intérêts moraux et matériels en évitant l’engagement anormal de sa responsabilité civile et aussi de sa responsabilité déontologique qui de la même manière est maintenant couramment recherchée. Le client demande souvent « un simple certificat » mais il n’existe pas de simples certificats. Il est bon à ce propos de relire son code de déontologie et en particulier l’article R.242-38 du code rural et de la pêche maritime(2). Ce certificat avant cession doit être consciencieusement établi, tant sur la forme que sur le fond. Sa simplicité n’est qu’apparente, il est porteur de pièges en puissance.
Pour être complet, il y a lieu de rappeler qu’il existe un autre volet à risques, c’est le certificat que peut être amené à établir le vétérinaire de l’acheteur à qui on présente le chiot nouvellement acquis pour la première fois. Le risque d’instrumentalisation du praticien n’est pas nul. Et si le risque en termes de RCP est plus faible, celui en termes de responsabilité déontologique ne l’est pas.
En résumé et en conclusion, les vétérinaires doivent adopter une stratégie rigoureuse de réalisation de leurs examens cliniques de chiots destinés à la vente, en dehors du fait qu’ils doivent de façon générale apporter le plus grand soin à la rédaction de tous leurs certificats, sans exception.
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