Pour commencer, testez vos connaissances sur le dossier médical en chirurgie dentaire
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Le dossier médical, élément clé en cas de litige ?
Lorsque la responsabilité civile professionnelle d’un praticien est recherchée par un patient, l’expert, pour statuer sur la conformité des actes, s’appuie sur les déclarations des parties.
Cependant, s’agissant d’une approche technique, l’élément d’analyse fondamental est constitué par le dossier médical. Celui-ci présente donc deux aspects complémentaires :
- répondre aux exigences légales,
- constituer une base d’analyse objective en cas de litige.
Le dossier médical constitue un élément de preuve
Incomplet ou négligé, le dossier médical ne permettra pas d’étayer le rapport d'expertise par des bases objectives ni de démontrer l’absence de manquement. Le praticien mis en cause ne pourra être pleinement défendu quand bien même la pratique serait techniquement conforme.
L’invocation des divers accidents affectant le dossier médical - bug, incendie, inondation, changement d’ordinateur etc. - est parfois considérée comme suspecte et joue contre le praticien qui est censé assurer la sauvegarde des données du patient ; elle devra être justifiée par des documents objectifs.
La preuve en matière d’information incombe au praticien
Le dossier doit donc comporter tous les éléments susceptibles d’établir que le patient a eu le choix éclairé de son traitement.
Seront donc conservés les formulaires de consentement éclairé personnalisés, mais seront également reportés dans le dossier les éléments d’information apportés en particulier sur les risques graves et normalement prévisibles, ainsi que les bénéfices du traitement proposé.
En cas de procédure
Le praticien pourra alors être défendu sur des bases objectives et non sur ses simples déclarations qui seront mises en balance avec celles du patient. Il sera ainsi possible d’éviter que l’expert judiciaire ne dresse la liste trop souvent interminable des manquements administratifs – non nécessairement d’ailleurs à l’origine d’un préjudice direct - qui ne manque pas d’instaurer le doute dans l’esprit du juge, quand bien même les soins auraient été conformes aux règles de l’art.
Que doit contenir le dossier médical ?
Le dossier médical est l’élément de preuve le plus probant dans le cadre d’un suivi de soin, c’est pourquoi sa tenue est une exigence légale participant directement à la qualité des soins devant être consciencieux, attentifs et conformes aux données acquises de la science.
Plusieurs éléments sont indispensables à la bonne tenue d’un dossier médical, il s’agit notamment :
- des informations administratives relatives au patient ;
- de la fiche technique : les comptes rendus des consultations et des actes effectués ;
- des données médicales : motif de la consultation, questionnaire médical écrit et actualisé régulièrement, bilan clinique complet ;
- des devis proposés et signés par le patient ;
- des comptes rendus opératoires ;
- des radiographies réalisées au départ et en cours de traitement.
 
Ainsi, il est absolument nécessaire de réaliser un cliché radiographique avant toute extraction d’une dent, quelle qu’en soit la mobilité. Ce cliché la montrera dans son intégralité avec la structure osseuse.
Il est obligatoire de disposer de clichés pré, per et postopératoires pour la réalisation d’un traitement endodontique ou, pour ce qui est du cliché peropératoire, de justifier de l’utilisation d’un localisateur d’apex dont la fiabilité est établie.
Dans le cadre d’axes complexes tels que l’implantologie ou l’orthodontie, il est nécessaire de compléter le dossier médical par d’autres éléments :
- Le plan de traitement retenu ainsi que les alternatives de réhabilitations proposées et chiffrées.
- Le consentement éclairé du patient.
- Le devis daté et signé.
- Tout type de correspondance (courriers ou mails) avec le patient ou d’autres intervenants.
 
Tous les actes doivent y figurer, jusqu’aux simples retouches gracieuses.
En vertu de l’article L.1111 2 alinéa 7 du Code de la santé publique, il appartient au praticien de prouver que l’information a été correctement délivrée à son patient et que celui-ci a donné son consentement éclairé.
Dès lors, le dossier médical peut lui permettre de comporter tous les justificatifs prouvant que le patient a eu connaissance et le choix de son traitement. Cette preuve peut être rapportée par tous moyens.
Combien de temps conserver le dossier médical ?
Au regard du droit, aucun texte ne fixe la durée de conservation des dossiers au sein d’un cabinet d’exercice libéral.
Toutefois, la loi du 4 mars 2002 établit que le délai pendant lequel la responsabilité du professionnel de santé peut être recherchée est de 10 ans à compter de la consolidation du dommage.
Dans ces conditions, il est nécessaire que le chirurgien-dentiste conserve les dossiers médicaux pendant la durée de prescription des actions en responsabilité, soit 10 ans à compter de la date de consolidation du dommage.
Cependant, la consolidation pouvant intervenir très tardivement, en pratique, il convient de conserver le dossier pendant au minimum 20 ans, voire à vie.
Le conseil de l’Ordre des chirurgiens-dentistes préconise également une durée de conservation minimale de 20 ans.
En cas de cessation d'activité
- Cessation temporaire d’activité : les dossiers médicaux doivent être conservés par le remplaçant.
- Cessation définitive d’activité : le chirurgien-dentiste doit s’assurer de la conservation de ses dossiers en les mettant soit à la disposition de son successeur, soit en les conservant lui-même, soit en les remettant à ses patients moyennant l’établissement d’un récépissé daté et signé comportant la liste des documents transmis.
- Arrêt d’une activité de collaboration : tout collaborateur libéral dispose de sa propre patientèle. À son départ, il doit donc emporter une copie de ses données et non les laisser uniquement dans la base du titulaire. La difficulté réside dans le tri minutieux des données en fonction des différents praticiens du même cabinet, si la base de données leur est commune.
- Arrêt d’une activité en SELARL : à l’inverse, dans le cas d’une SELARL, la patientèle appartient à la société. C’est donc à cette dernière qu’il revient d’assurer la conservation des données médicales et de les communiquer au patient si celui-ci en fait la demande.
Quelles sont les méthodes de protection et de sauvegarde des données ?
Pour justifier de l’impossibilité à produire le dossier médical de leurs patients, les chirurgiens-dentistes évoquent souvent des pertes de données liées à un changement de matériel ou de logiciel.
Il est utile de vérifier l’agrément DSIO (Données Standard pour l’Informatique Odontologique) ou, à l’avenir, TDIO (Transfert de Données Informatiques en Odontologie) du logiciel afin de pouvoir exporter les données essentielles mais limitées (fiche d’actes sans détails par exemple) depuis l’ancien vers le nouveau software. Cependant, certaines informations ne peuvent être encodées dans ce format : données cliniques, plans de traitement, radiographies, etc., ce qui limite les renseignements produits.
Malheureusement, quelques éditeurs rechignent à accompagner leurs clients dans le transfert de leur base de données.
Une alternative consiste à utiliser en parallèle l’ancien et le nouveau logiciel dentaire ou radiographique, afin de conserver toutes les informations utiles. Seul le plus récent sera utilisé au quotidien, à partir d’une base vierge ; les anciennes données ne seront que consultées, sans y apporter de modifications. Cela peut toutefois nécessiter une prolongation de la licence.
Les cabinets dentaires évoluant progressivement vers le tout-numérique, les outils de sauvegarde intégrale chiffrée, en local et à distance (cloud archive) sont à privilégier. Les risques physiques et informatiques sont alors entièrement couverts.
À cet effet, le ministère de la Santé n’approuve que certains hébergeurs par la certification HDS (Hébergeur de Données de Santé), car ils répondent à des conditions de sécurité adaptées.
Si le chirurgien-dentiste est censé pouvoir disposer pleinement des informations de ses patients, force est de constater qu'il n'en a pas la parfaite maîtrise dans la pratique. Il demeure toutefois entièrement responsable de leur conservation et protection.
Quels sont les droits du patient sur son dossier médical ?
En vertu de l’article L.111-7 du Code de santé public, le patient a un accès direct à son dossier médical. Il ne pourra être remis qu’à lui seul ou à tout médecin désigné comme intermédiaire par le patient. La communication doit intervenir au plus tard dans les 8 jours suivant la demande et au plus tôt après un délai de réflexion de 48 heures.
Si les informations médicales souhaitées datent de plus de 5 ans, le délai peut être prorogé à 2 mois.
Au regard du droit, il n’existe aucun formalisme particulier pour la demande du dossier médical.
En cas de décès du patient, le praticien ne pourra délivrer le dossier médical aux ayants droit que si le défunt ne s’y est pas opposé de son vivant.
Le praticien qui refuserait de transmettre le dossier médical de son patient peut être sanctionné par les juridictions civiles ou disciplinaires. La CNIL, par une délibération du 18 mai 2017, a prononcé une sanction disciplinaire de 10 000 € à l’encontre d’un chirurgien-dentiste qui a refusé de transmettre le dossier médical de son patient.
Quelles sont les sanctions en cas de perte des données médicales ?
Outre le fait de priver le praticien d’une défense optimale en cas de litige, la perte des données médicales, avec pour conséquence l’impossibilité de communiquer au patient son dossier, peut conduire à divers types de sanctions.
Ce dernier peut solliciter le Conseil de l’Ordre, lequel déterminera la nature de cette éventuelle sanction.
S’il estime subir un préjudice, il peut saisir le tribunal judiciaire.
Enfin, la CNIL est compétente pour sanctionner financièrement un praticien pour non-respect du droit d’accès aux données médicales par le patient. Ces amendes s’élèvent jusqu’à 4% du chiffre d’affaires annuel.
À retenir
Il est donc fortement recommandé aux praticiens de porter la plus grande attention à la gestion et la conservation des dossiers médicaux, d'autant plus en cas de litige avec un patient : la responsabilité du chirurgien-dentiste peut être retenue pour carence à ce niveau.
 
                 
            
             
            
             
                 
            
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