Suis-je personnellement responsable en cas de faute ?
Il faut distinguer trois hypothèses.
Vous êtes sage-femme hospitalière
Les réclamations indemnitaires dirigées contre les agents hospitaliers sont prioritairement orientées vers l’établissement hospitalier employeur, pour un défaut d’organisation du service ou du fait de la faute commise par son agent.
Cependant, la responsabilité personnelle de la sage-femme hospitalière n’est pas totalement exclue. Elle peut être retenue en cas de faute détachable du service (mais cette hypothèse est rare, les critères pour reconnaître le caractère détachable de la faute étant très stricts).
Vous êtes sage-femme salariée
Il est de jurisprudence constante, depuis un arrêt de la Cour de cassation du 9 novembre 2004, qu’une sage-femme salariée n’engage pas sa responsabilité personnelle en cas de faute, sauf si elle a excédé les missions qui lui ont été confiées par son employeur. L’appréciation de cet éventuel excès de mission est du ressort du juge en cas de litige.
Vous êtes sage-femme libérale
Vous engagez votre responsabilité personnelle.
Important
Quel que soit votre statut, vous engagez votre responsabilité personnelle en cas de mise en cause pénale et ordinale.
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Suis-je responsable si je fais office d’aide opératoire pendant une césarienne ?
Les compétences des sages-femmes sont définies aux articles L.4151-1 et suivants du CSP. Elles ne peuvent donc pas réaliser d’actes réservés à d’autres professionnels de santé qualifiés. Les fonctions de circulant, aide-opératoire ou instrumentiste ne relèvent donc pas de leur cadre réglementaire.
L’Ordre national des infirmiers comme le Conseil national de l’Ordre des sages-femmes ont rappelé que "le code de la santé publique en son article R.4311-11 ne porte nulle mention des fonctions de circulant, aide-opératoire ou instrumentiste dans le cadre de la réglementation de la profession de sage-femme. Ces fonctions sont réservées aux infirmiers. C’est parce qu’il existe des actes spécifiques qui nécessitent des connaissances spécifiques, et donc une formation spécifique que le rôle de l’IBODE doit être garanti".
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Suis-je responsable si j’interviens en salle de réveil pour la surveillance d’une patiente après une césarienne ?
Pour répondre à cette question, il faut combiner deux articles du code de la santé publique (CSP) :
- Article D.6124-98 : La surveillance post-anesthésique doit être mise en œuvre dans une salle de surveillance postinterventionnelle dont peut tenir lieu la salle de travail située dans une unité d’obstétrique, en cas d’anesthésie générale ou loco-régionale pour des accouchements par voie basse.
- Article D.6124-101 : En salle de surveillance postinterventionnelle, la surveillance du patient peut être assurée par des sages-femmes, mais seulement pour les interventions prévues au 1º de l'article D. 6124-98, c’est-à-dire après un accouchement par voie basse.
Les textes n’autorisent donc pas la sage-femme à prendre en charge une parturiente en salle de réveil après une césarienne.
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Suis-je responsable si je quitte le service d’hospitalisation où je suis affectée pour prêter main forte en secteur de naissance ?
Le personnel en service en secteur d’hospitalisation ne peut, pendant la durée de ce service, accomplir des tâches concomitantes dans un autre secteur, quel qu’il soit.
En effet, l’article D.6124-46 du CSP impose la présence minimale d’une sage-femme le jour, assistée d'un aide-soignant et d'une auxiliaire de puériculture. La nuit, la surveillance peut être assurée par une sage-femme ou un infirmier ou une infirmière, assisté d'une auxiliaire de puériculture.
Suis-je responsable si je quitte mon service en secteur de naissance pour prêter main forte en service de suites de couches ?
L’article D.6124-44 du CSP est clair : pour les maternités réalisant moins de 1 000 naissances par an comme pour celles qui en réalisent davantage, une sage-femme doit a minima être présente et affectée en permanence dans le secteur de naissance. Elles ne peuvent avoir d'autres tâches concomitantes dans un autre secteur ou une autre unité.
Seule exception : si l'unité d'obstétrique réalise moins de 500 naissances par an, la sage-femme peut également, sous la condition de l'absence de parturiente dans le secteur de naissance, assurer les soins aux mères et aux nouveau-nés en secteur de soins et d'hébergement.
Suis-je responsable si lors d’une échographie obstétricale, je ne détecte pas une malformation fœtale ?
Non, pas systématiquement.
L’article L.114-5 du code de l’action sociale et des familles (CASF) pose la condition d’une faute caractérisée pour l’indemnisation des parents d’un enfant né avec un handicap non décelé au cours de la grossesse. La jurisprudence en a progressivement dessiné les contours : pour être caractérisée, la faute doit revêtir des caractères d’intensité et d’évidence.
Pour l’évaluer, l’expert judiciaire nommé dans le cadre d’une procédure, puis le juge, examinent un certain nombre de critères, parmi lesquels :
- le matériel utilisé (ancienneté, entretien, etc.),
- le compte rendu (est-il complet ? pertinent ?),
- l’information donnée aux parents sur les limites de la technique,
- l’expérience professionnelle et la compétence de l’opérateur (formation, expérience, etc.).
Si, en fonction de l’ensemble de ces éléments, il est reconnu une faute caractérisée, la sage-femme est susceptible d’engager sa responsabilité.
Suis-je responsable si j’assure le suivi d’une grossesse pathologique ?
L’article L.2122-1 du CSP dispose que "(…) Lorsque, à l'issue du premier examen prénatal, la sage-femme constate une situation ou des antécédents pathologiques, elle adresse la femme enceinte à un médecin."
L’article L. 4151-3 du CSP prévoit de son côté "qu’en cas de pathologie maternelle, fœtale ou néonatale pendant la grossesse, l'accouchement ou les suites de couches, et en cas d'accouchement dystocique, la sage-femme doit faire appel à un médecin. Les sages-femmes peuvent pratiquer les soins prescrits par un médecin en cas de grossesse ou de suites de couches pathologiques".
Dans ces situations, la sage-femme doit donc passer le relais à un médecin, sauf dans une hypothèse : si les consultations se limitent à pratiquer des soins prescrits par le médecin. En effet, dans ce cas, la sage-femme ne réalise que les soins prescrits par le médecin, qui reste responsable du suivi de la grossesse.
Suis-je responsable si je tarde à prévenir l’obstétricien des troubles du RCF au cours d’un accouchement ?
Trois textes rappellent les limites des compétences de la sage-femme en cas d’accouchement dystocique :
- Article L.4151-3 du CSP : en cas d'accouchement dystocique, la sage-femme doit faire appel à un médecin.
- Article R.4127-313 : la sage-femme ne doit pas, sauf circonstances exceptionnelles, effectuer des actes ou donner des soins, ni formuler des prescriptions dans les domaines qui débordent sa compétence professionnelle ou dépassent ses possibilités.
- Article R.4127-325 : la sage-femme doit faire appel à un médecin lorsque les soins à donner débordent sa compétence professionnelle.
Toute la difficulté sera de savoir à partir de quel moment un accouchement devient dystocique, et si la sage-femme l’a identifié comme tel.
Important
Dans ce contexte, il est très important de tracer parfaitement le déroulement de l’accouchement, les anomalies constatées et les mesures prises pour y remédier.
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Suis-je responsable si je renouvelle les injections de l’anesthésie péridurale au cours de l’accouchement ?
Conformément à l’article R.4127-318 du CSP, la sage-femme est autorisée, au cours du travail, à effectuer la demande d'analgésie loco-régionale auprès du médecin anesthésiste-réanimateur, qui réalise la première injection.
Pour ce qui est du renouvellement des injections, il précise qu’il n’est possible que sous réserve que l’anesthésiste puisse intervenir immédiatement. À défaut, vous pourriez engager votre responsabilité.
Suis-je responsable si je réalise des soins infirmiers ?
Conformément à l’article L.4151-1 du CSP, la sage-femme est compétente pour la pratique des actes nécessaires au diagnostic et à la surveillance de la grossesse, la préparation à l’accouchement, la surveillance et la pratique de l’accouchement eutocique et les soins postnataux.
Elle n’est pas autorisée à accomplir des actes de soins ou à traiter des pathologies relevant d’un autre domaine que celui prévu à cet article, ceci d’autant plus que, comme le rappelle l’article R.4127-313 du CSP, elle ne doit pas, sauf circonstances exceptionnelles, effectuer des actes ou donner des soins, ni formuler des prescriptions dans les domaines qui débordent sa compétence professionnelle ou dépassent ses possibilités.
Ainsi, une sage-femme peut réaliser des soins infirmiers dans le cadre de l’exercice de sa profession (notamment les soins aux femmes hospitalisées au sein de services de maternité, de grossesses pathologiques et de chirurgie gynécologique, sur prescription du médecin) mais pas ceux qui n’auraient aucun rapport avec son champ de compétence.
Crédit photo : SPL / BSIP

